Si vous êtes sensible à ce qui se trouve dans l'onglet spoiler, ne lisez pas cette histoire.
- Spoiler:
Nagisa aimait l'attention, il aimait encore plus quand les yeux se détournaient pour l'observer. Habitant de Centralis Civitatem, il pouvait se pavaner sans peine dans les rues et obtenir de nombreux regards. C'est d'ailleurs ce qu'il faisait, ce jour-là. Il avait tronqué ses vêtements amples pour des vêtements épousant ses formes. Ses vêtements exposaient au maximum sa peau, sans trop en dévoiler. Ce matin-là, il se déhanchait dans les rues pour obtenir l'attention qu'il voulait tant. Il rêvait de ressembler aux personnes dans les histoires de ses grand-parents ; Ces gens qui étaient des célébrités, tout le monde connaissaient leurs noms, et ils n'avaient rien fait de plus que d'être beaux et sexy. Voilà le rêve auquel aspire Nagisa : Être célèbre pour aucune bonne raison.
Son plan fonctionnait bien : Femmes, hommes, personnes âgées, tous se retournaient lorsqu'il passait. Il prenait bien le temps de se déhancher et de faire des clins d'oeil aux hommes qui croisaient son regard. À force de se promener régulièrement ainsi dans la rue, il avait commencé à se bâtir une réputation. Parfois, les gens se décidaient à l'aborder. Il s'agissait de moments précieux où il se pendait aux lèvres de son interlocuteur, acquiesçant à tout ce qu'il disait, lui répétant ce qu'il voulait entendre et en nourrissant son discours de mensonges pour se rendre plus intéressant. Il se nourrissait de la lumière dans ses yeux, de sa joie à son égard.
Mais sans cette attention, il n'était rien.
Cet homme qu'il avait rencontré encore aujourd'hui n'était qu'un parmi tant d'autres. Une fois qu'il ne lui donnait plus son entière dévotion, il se retrouvait confronté à la réalité. Lorsqu'il retourna chez lui, il fut accueillie d'un grand sourire par sa famille. Sa mère vient lui donner un câlin et son père, depuis son fauteuil et lisant un livre, le salua d'une main. Il lui répondit d'un sourire et alla dans sa chambre. Il avait tout ce qu'un humain vivant au Niflheim pouvait rêver : Une famille unie et aimante, des biens matérielles et des richesses permettant de subvenir adéquatement à leurs besoins, un garde-robe plein à craquer de vêtements, un toit qui ne fuit pas... Et pourtant, ce vide intérieur persistait. Il recherchait de plus en plus d'attention, et ce n'était jamais assez. Il sait qu'il pourrait aller plus loin, offrir son corps afin d'obtenir l'attention interrompu d'un homme, mais il savait que ça ne suffirait pas à remplir le vide. Il avait besoin de l'attention de plus d'une personne. Ses promenades à moitié dénudé en plein coeur du centre-ville ne lui suffisait plus. D'habitude, il arrivait à passer la journée de bonne humeur suite à cela, mais là, il venait à peine de revenir qu'il voulait y retourner. Il avait besoin de quelque chose de plus fort, qui rassemblerait une foule, qui lui procurerait une forte sécrétion de serotonine...
Et c'est ainsi qu'il se retrouva au sommet du clocher de la place publique.
Du haut du lieux religieux le plus connu de la ville la plus peuplée de tout Niflheim, le voilà qui se trouvait au-dessus d'une foule en panique. Il s'amusait à se balancer sur le bord du bâtiment. Plus son corps penchait vers le vide, plus la foule criait. L'énergie était jouissive. Pour la première fois, depuis aussi longtemps qu'il pouvait se souvenir, il ne s'était jamais sentit vivant comme il l'était à ce moment. Il se demandait jusqu'où il pouvait aller, jusqu'où il pouvait les faire s'inquiéter pour son bien-être, jusqu'où sur une horloge pourrait-il prolonger toute cette attention sur lui?
Et hop, sur une jambe, il se balançait maintenant sur le bord du mur.
Les cris s'élevèrent de plus belles. Les défenseurs de la ville avaient rejoints la foule. On lui criait de descendre, qu'il ne devait pas le faire, que la population humaine avait besoin de rester en vie afin de faire face aux dieux, que sa mort ne servirait à rien. Il pouvait voir des défenseurs sous lui tenter d'ouvrir la porte pour le rejoindre et l'empêcher de faire l'irréparable. Mourir n'avait jamais été son intention, tout ce qu'il voulait, c'était de rester sur la scène, demeurer le centre de l'attention. Les défenseurs constatèrent qu'il avait barricader la seule entrée permettant de rejoindre le clocher. Il était le maître de la scène, c'est à lui de décider quand les rideaux devaient se baisser, et il ne laisserait personne lui enlever son moment. Il se mit dos à la foule, et fit comme si il allait se laisser tomber vers l'arrière. Tous ces cris le stimulait tellement. Chaque fibre de son corps vibrait avec la panique des gens sous lui. Il se disait qu'il pourrait rester comme ça indéfiniment, que c'était le plus beau jour de sa vie.
Un coup.
Les défenseurs s'étaient munis d'un bélier, ils essayaient de défoncer la porte. Le coup fut puissant, faisant trembler l'ensemble de la structure. Dos à la scène, Nagisa n'était pas prêt à ce coup.
Son pied glissa.
Et il tomba.
Douleur.
Tout devint noir.
Il n'entendait plus les cris.
Mais il entendit une voix.
Une voix féminine l'adressa.
"Nagisa, tu vis pour la lumière de la scène pour combler l'obscurité dans ton coeur. Tu as volé trop près du soleil, mais tu ne t'éteindras pas cette nuit, petite étoile. Je compte sur toi pour illuminer la vie des humains."
Il ouvrit de nouveau les yeux. Il était au milieu de la foule, son propre cadavre méconnaissable à ses pieds. Il devrait être horrifié, confus, paniqué... Mais tout ce dont il pouvait penser, c'était la foule qui avait toujours ses yeux rivés sur lui. Fou de joie, son corps illumina tel une boule disco.
"Mesdames et Messieurs, me voici ! Dans toute ma splendeur, vous n'allez plus pouvoir vous passez de moi~"